Izmit (parfois orthographiée Ismidt au XIXe et au XXe siècle), l’ancienne Nicomédie, est une ville de plus de 300 000 habitants située sur la mer de Marmara, dans le golfe éponyme. C'était et c'est toujours un centre économique important avec un grand port. Elle a subi de nombreuses destructions lors du tremblement de terre en 1999 qui fit au moins 15000 morts.

Carte postale en couleurs envoyée au début du XXe siècle

Carte publiée par un éditeur local : Thausis-Zadé Mehmed Nazif, Ismidt. La légende de la carte ainsi que le cachet de la poste portent la mention "Ismidt".

 

Cartes postale envoyée le 27 août 1929

Vue du golfe d'Izmit avec des bateaux.

Texte de la carte

Nous avons conservé l'orthographe.

Izmit, den 27. August 1929 [27 août 1929]
Liebe Freundin [Chère amie],

Je vous remercie pour votre aimable carte postale que j'ai reçue la semaine passée.
Est-ce que vous avez apris la natation et vous nagez bien maintenant ? J'espère que vous êtes rentré et vous avez reçu les photos que je vous avais envoyées ?
La semaine passé, vendredi, nous avons fait un pique-nique à un village du golfe d'Izmit que vous voyez sur les photos.
Amitiés et beaucoup de souvenirs.

Extrait de Vidal Cuinet, 1894

Vidal Cuinet, La Turquie d'Asie : géographie administrative, statistique, descriptive et raisonnée de chaque province de l’Asie mineure, Volume 4, Paris, Ernest Leroux, 1894, pages 358-362

La ville actuelle d'Ismidt s'étend au bord et au nord du golfe de même nom, au pied des collines où s'élevait l'Acropole de l'antique Nicomédie. Son ancien nom turc d'Iznikmid, aujourd'hui hors d'usage, n'était, dit-on, qu'une corruption des mots grecs "eis Nikimedeian" par lesquels on désignait la ville byzantine bâtie sur les ruines de la capitale du roi Nicomède Ier. L'aspect général de cette ville est pittoresque, riche et gai, surtout du côté de la mer où elle se présente en amphithéâtre, avec ses maisons en bois, peintes de vives couleurs, entourées de jardins dont la fraîche verdure et la parure de fleurs forment un agréable contraste avec la blancheur de ses nombreuses mosquées ombragées de noirs cyprès. Les eaux bleues du golfe, l'animation du port, le mouvement des chantiers de l'arsenal maritime, le va-et-vient des petites embarcations qui font le service local, la forêt de mâts des navires à l'ancre et leurs éclatants pavillons se détachant sur le ciel, complètent l'ensemble du riant tableau de cette ville déchue, il est vrai, mais encore en possession, par le commerce, de son ancienne importance.

Il y a à Ismidt 2 palais impériaux, dont l'un, commencé sous le règne d'Abd ul-Médjid fut achevé par Abd ul-Aziz qui l'avait choisi pour rendez-vous de chasse favori. On vantait la splendeur des appartements richement décorés par un artiste parisien, M. Masson, alors peintre de Sa Majesté. Le konak ou hôtel du gouverneur, bien que construit en bois, n'en est pas moins un assez bel édifice. L'hôtel municipal n'a rien de remarquable. L'arsenal maritime, où l'on construit encore aujourd'hui des frégates, est une fondation du fameux grand vizir Keuprulu. Parmi les 55 mosquées de cette ville, on peut citer particulièrement celle que Peter Pacha, grand vizir de Sultan Suléiman el-qanouni (Soliman le Législateur), fit bâtir par maître Sinan, sur le modèle de la Suléimaniyé de Constantinople, qui serait le chef-d'œuvre de ce grand architecte s'il n'était aussi l'auteur de la Sélimiyé d'Andrinople. Il faut mentionner également la grande mosquée Orkhaniyé située dans le haut quartier ; c'est une magnifique église byzantine désaffectée et consacrée au culte islamique par le sultan Orkhân vers 1330.

On compte à Ismidt et dans sa banlieue 17 églises, 4 monastères, 2 chapelles, dont l'une appartient aux Arméniens catholiques et l'autre à la mission protestante, et 1 synagogue. La grande église des Arméniens grégoriens est très simplement construite, mais assez richement ornée. Le monastère grec orthodoxe de Agios Pantéléimon, situé à la distance de 1,500 m. à l'ouest de la ville, a été réédifié dernièrement sur le tombeau même du saint auquel il est dédié, non loin du cimetière arménien. Dans ce cimetière, on remarque le tombeau du magnat hongrois, Émeric Tékéli, qui servait contre l'Autriche dans l'armée du grand vizir Kara-Mustapha. Lorsque celui-ci fut contraint par le roi de Pologne Jean Sobieski, de lever le siège de Vienne, le 12 septembre 1683, Tékéli voulut en vain continuer à prendre part à la guerre sous le nouveau grand-vézir. Après avoir subi plusieurs insuccès, il fut ramené prisonnier à Constantinople par ordre de Sultan Mohammed IV qui lui assigna pour résidence Ismidt où il mourut en 1705, sous le règne d'Ahmed III.

Outre ces édifices, il y a à Ismidt 5 tekké ou couvents de derviches ; 2 imaret ou hospices pour les étudiants pauvres ; 17 turbé ou chapelles funéraires ; 3 médressé ou facultés de droit islamique ; 1 hôpital ; 1 direction de la douane ; 1 station télégraphique de service international (langues turque et française) ; 1 office sanitaire ; 1 dépôt militaire ; 1 dépôt de marchandises ; 10 bains publics (hammam) ; 146 fontaines publiques ; 2 minoteries ; 39 moulins ; 2 scieries ; 4 magnaneries ; 34 boulangeries ; 35 cafés ; 1,140 boutiques ; 11 fabriques d'huile de sésame et 5,857 maisons. On exploite aux environs 5 carrières de pierre à bâtir et 1 chantier de bois de construction. Deux usines de l'État 1 fabrique de drap militaire et 1 fabrique de fez, sont situées à proximité de la ville.

Notice historique. - Deux villes furent fondées par les Mégariens dans le golfe qui porta successivement le nom de la première, Astacus, puis de la seconde, Olbia, et enfin celui de Nicomédie. Astacus existait encore du temps de l'empereur Constantin Porphyrogénète, qui mentionne cette ville au quatrième rang après Nicomédie, métropole. Celle-ci fut fondée par Zipoetès, père de Nicomède Ier ; mais ce dernier, jaloux de donner son propre nom à la nouvelle capitale de son royaume dans laquelle il appela la population des villes voisines ruinées durant la guerre livrée à son père par Sysimaque, en fit une seconde et solennelle dédicace précédée de sacrifices aux dieux protecteurs de la Bythinie. Il fit élever, sur la place principale, sa statue en ivoire transportée à Rome sous Trajan, et il entoura la ville d'une forte enceinte de murailles dont les soubassements, formés d'énormes blocs de pierre calcaire, supportent encore aujourd'hui les ruines des tours et autres ouvrages élevés plus tard sous la domination romaine. La date de la première fondation de Nicomédie n'a pas été conservée. Quant à la seconde dédicace, elle eut lieu naturellement peu après à l'avènement de Nicomède ler, en 281 av. J.-C. La ville de Nicomédie fut embellie et richement dotée par les rois de Bythinie, dont la magnificence attirait à leur cour les rois voisins, et les plus illustres personnalités de tous les états situés autour des mers de l'ancien monde. Annibal y vint chercher un refuge sous les rois Prusias Ier et Prusias II, bâlit pour eux Prusa ad Olympum (Brousse) et commanda lui-même la flotte bythinienne qui mit en fuite les vaisseaux d'Eumène. Sous le dernier Nicomède, ami des Romains, César y fit un long séjour.

Nicomède III légua à sa mort, en 75 avant J.-C., la Bythinie aux Romains. Silanus, Lucullus et Cotta, recueillirent, non sans peine, ce brillant héritage contesté par Mithridate. La domination romaine ne fut pas moins favorable à Nicomédie que celle de ses rois. Quoique décrétée province du peuple romain et gouvernée par des proconsuls tirés au sort, la Bythinie fut traitée. en alliée plutôt qu'en pays conquis. Elle fut pourvue de routes, de canaux, de ports et de beaucoup d'ouvrages utiles. Les gouverneurs romains qui siégeaient à Nicomédie, lui procurèrent souvent de grands avantages. Pline l'embellit d'une place publique et la dota d'un aqueduc. Ses lettres à Trajan sont remplies des marques du grand intérêt qu'il portait à cette ville. Mais un violent incendie, qui se déclara en son absence, détruisit tous les monuments publics et beaucoup de maisons particulières. Ces pertes furent réparées par la munificence impériale ; plusieurs empereurs prirent en affection le séjour de Nicomédie ; Héliogabale y passa l'hiver qui suivit son élection en 218.

Dioclétien songea à en faire une seconde métropole de l'Empire et s'occupa avec activité de l'agrandir et de l'embellir ; il y fit construire plusieurs palais, des arsenaux, 1 hôtel des monnaies, des fabriques d'armes, durant la longue résidence qu'il y fit. Malheureusement, en 303, cédant à la pression de Galérius,

il décréta la persécution des chrétiens qui commença en sa présence par le pillage de l'église cathédrale et le martyre de l'évêque saint Anthyme. En 305, l'empereur, dégouté du pouvoir, abdiqua publiquement, en grande cérémonie, dans la plaine située à l'est de Nicomédie, et partit aussitôt pour Salone, sa ville natale, où il passa le reste de ses jours à cultiver son jardin.

Nicomédie eut beaucoup à souffrir durant la guerre des Romains et des Perses, et quelques années plus tard elle fut ravagée par les Goths auxquels une trahison l'avait livrée. Un tremblement de terre, dont les suites ont été décrites par Libanius et Ammien Marcellin, la détruisit de fond en comble. Ce ne fut que sous le règne de Justinien qu'elle parvint à recouvrer une partie de son ancienne splendeur.

Aucun évènement digne d'intérêt n'eut lieu à Nicomédie à partir de cette renaissance jusqu'en 1328 (727 [de l’hégire]), date de sa conquête par le sultan Orkhân. Depuis lors, Ismidt n'a pas cessé de faire partie de l'Empire ottoman.

Extrait de C. Texier, Asie mineure, 1862

Charles Texier, Asie Mineure : description géographique, historique et archéologique des provinces et des villes de la Chersonnèse d'Asie, Paris, Firmin Didot, 1862

La moderne Nicomédie est appelée par les Turcs Isnikmid, par suite de cette corruption de langage qui a altéré les noms des anciennes cités. Isnikmid n'est qu'une portion de ces mots grecs : εις Νικομήδειαν.

[ Nicomédie au XIXe siècle]

Le grand vizir Koupruli [Köprülü] a fait établir a Nicomédie des arsenaux maritimes qui ont longtemps fourni les galères et les caravelles les plus estimées de Constantinople. Tous les armements importants se font à Constantinople, mais on construit encore à Nicomédie quelques bâtiments de guerre. Cette ville doit à son heureuse position, à son voisinage des forêts, et à l'activité de ses habitants, de n'avoir pas déchu du rang qu'elle occupait.

Turcs : 2500 familles
Grecs : 1200
Arméniens : 800
Juifs : 500

Mais on sait combien il est difficile d'obtenir des renseignements exacts sur la population réelle des villes musulmanes ; car tout le monde, les gouverneurs comme les habitants, ont intérêt à en dissimuler le chiffre. Quelque confiance que l'on inspire aux rayas, ils croiront toujours utile de diminuer le nombre de leurs coreligionnaires, parce que le karatch ou capitation étant établi par tête, et recueilli par les tchorbadji, ou primats de chaque nation, on parvient ainsi, en divisant l'impôt sur un plus grand nombre de têtes, à en alléger le poids, et les gouverneurs devant remettre au trésor le montant des impôts établis sur un nombre donné d'habitants, sont enclins à donner un chiffre moindre pour qu'il reste une partie notable de l'impôt perçu,dans leurs caisses.

Le principal commerce de Nicomédie est le bois et le sel. On a utilisé les vastes marais qui sont au fond du golfe, pour établir des salines qui sont d'un grand produit. La fabrication du sel est entre les mains des particuliers ; le gouvernement se réserve la dîme du sel fabriqué. Le commerce de bois est libre, à la charge de vendre au gouvernement les échantillons de choix qui peuvent être utiles à la marine. Mais cette liberté est chèrement achetée par les charges qui pèsent sur les habitants ; car les Rayas comme les Turcs, qui s'occupent du commerce des bois, doivent fournir en corvées les ouvriers nécessaires au service de la marine. Le gouvernement alloue une journée de cinq piastres pour les ouvriers de ces chantiers ; mais cette somme est rarement payée intégralement, et nul n'oserait la réclamer du gouverneur. Les Arméniens se livrent volontiers à la fabrication du maroquin, qui s'exporte à Constantinople.

La ville moderne de Nicomédie est composée de vingt-trois quartiers, dont dix-neuf sont habités par les Turcs, trois par les chrétiens et un par les juifs.

La plus ancienne mosquée était autrefois une église grecque qui fut consacrée par le sultan Orkhan au culte de l'Islam. Le plus grand temple musulman a été bâti par Pertew pacha, grand vizir du sultan Soliman le Grand, et qui resta pendant sept ans à Nicomédie comme gouverneur. Cette mosquée est près du port à l'entrée de l'arsenal: Sinam, qui en fut l'architecte, imita dans de moindres proportions la mosquée que le sultan faisait bâtir à la même époque à Constantinople, et qui porte le nom de Soliman. Le même architecte construisit des bains et un caravanséraï. Ces monuments, en rapport avec le commerce et la population de la ville, n'offrent cependant rien de remarquable comme œuvre d'art. Il n'y a plus de traces du magnifique palais que le sultan Mourad IV fit bâtir à Nicomédie, et qui était entouré de jardins splendides. Les palais que les premiers sultans firent construire en Asie Mineure, celui de Broussa et celui de Magnésie du Sipylus, ne sont plus que des amas de décombres. L'arsenal impérial d'où sortirent jadis les vaillantes galères qui tinrent en échec les marines de Gênes et de Venise, aujourd'hui désert et ruiné, ne peut plus servir à la construction des bâtiments d'un fort tonnage ; car les atterrissements formés peu à peu au fond du golfe, ont comblé la darse et rendu le mouillage impraticable pour les grands vaisseaux.

Si les ruines de Nicomédie, examinées en détail, ne sont plus pour l'antiquaire qu'un souvenir vague et confus d'une civilisation effacée ; si l'artiste ne trouve rien qu'un sentiment pittoresque dans les constructions élevées par les Osmanlis, la nature s'y montre toujours vivace, grande et majestueuse ; les collines ombragées de térébinthes, les vigoureux et noirs cyprès qui entourent les demeures des morts, les jardins verdoyants qui embellissent chaque maison, donnent à la ville un aspect général de richesse et de gaieté qui s'évanouit quand on entre dans l'intérieur. Les nombreux cimetières placés près des mosquées renferment quelques monuments qui datent de l'époque où l'art des Turcs puisait ses inspirations dans l'école arabe. La décadence du style turc primitif date du règne du sultan Osman, qui envoya en Italie des artistes pour étudier les monuments de l'Occident: c'était l'époque où l'école du Bernin était à son apogée.

A leur retour, ils introduisirent dans les constructions les modèles d'un art italien déjà dégénéré, et encore abâtardi en passant dans des mains qui ne le comprenaient pas. Le faible reflet de l'art des Arabes fut totalement éclipsé, et l'art des Turcs tomba au degré où nous le voyons aujourd'hui.

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